Récit d’une journée de galère (édition rap old school)

Des journées de galères, on en a tous vécu. Ce type de journée qui n’est pratiquement teintée que de fausses notes. Mais aujourd’hui Notes Urbaines vous propose de suivre tout en musique le récit du quotidien de Jah (ou J), 20 ans, sexe non précisé, travail inconnu, aimant à galères, et au champ musical qui reste bloqué sur les musiques de rap old school.

7h15 : Le réveil est rude, Jah est en retard d’une demi-heure sur son rituel de réveil matinal et ne peut se contenter que d’une préparation express (lavage, un café long, un bon brossage des dents et une préparation rapide du sac) avant de prendre le métro pour aller bosser. Dans le métro, un doux rêve d’évasion se profile, tout en musique, ne serait-ce qu’un court instant, avant de revenir à une brutale réalité : le métro s’est arrêté depuis 8 minutes pour souci de maintenance, ce qui le rapproche d’un retard imminent à son travail. La musique suivante sur sa playlist en revanche, Pitbull de Booba, est d’une ponctualité tranchante (autant dans la mélodie mélancolique que dans les punchlines incisives du rappeur) afin de lui rappeler que la vie n’est pas tous les jours facile.

8h : Jah arrive tant bien que mal à l’heure et ouvre les portes qui mènent à son boulot. Un dernier petit café avant de commencer une bonne journée de travail. Jah s’empresse de mettre sa dernière pièce au distributeur à thé/café. En insérant sa pièce, son téléphone tombe de sa poche. Heureusement, tout était prévu pour amortir la chute grâce à la coque qui a laissé l’écran intact…mais provoqué une réinitialisation complète du téléphone. 

Et pour couronner le tout : un petit papier tombé par terre près du distributeur indique que la machine utilisée est en maintenance et qu’il est impossible de commander son café. Prêt à subir une énième fois les remontrances de son patron, Jah se dirige tant bien que mal vers son bureau en écoutant L’enfant seul d’Oxmo Puccino avant de se mettre dans le bain. Une mélodie teintée de mélancolie et des paroles percutantes qui vont lui rappeler que sa bonne étoile s’est éteinte, le/la laissant isolé-e et seul-e face au reste du monde. 

3h : La première partie laborieuse de la journée est enfin passée et la pause déjeuner se faisait attendre par J qui a eu le temps de tout préparer et de placer son tupperware dans son sac. La faim se fait sentir sur son visage et ses lèvres sont hydratées machinalement par sa langue qui tourne en rotation au moment d’ouvrir le sac. Quelle grande surprise lorsqu’il/elle s’aperçoit que son déjeuner, qu’il/elle avait préparé avec amour la veille, nage dans le fond de son sac avec toutes ses autres affaires qui font leurs longueurs dans la sauce.

Excédé-e par ce début de journée, une minuscule larme se retient au niveau de l’œil gauche. Mais cette dernière se résorbe lorsque son crush, qui travaille sur le bureau en face du sien, l’aide dans sa détresse en lui proposant sa moitié de sandwich avant de filer. “Rejoins-moi à la cafétéria quand t’auras tout nettoyé” dit-elle/il. Jah se décompose de soulagement et d’émerveillement. Elle/il décide alors de lancer sur son ordinateur Prototype d’Outkast, une musique suave sonnant un peu comme une ode à celle/celui qui fait chavirer son cœur.

14h-17h : La reprise de travail a été bien plus légère que son commencement. Maintenant que la connexion entre Jah et son crush est établie avec en prime une soirée en sa présence ainsi que celle de ses collègues de bureau, le J travaille tout en étant sur un petit nuage. Son long dossier, à rendre impérativement avant minuit pour son patron a été peaufiné, bouclé et envoyé en avance, ce qui lui laisse une heure pour se relaxer discrètement avec un bon petit remix de Travellin’ man de Mos Def, en se disant que le plus dur est enfin passé et qu’il/elle peut commencer à flotter.

18h : Une journée de calvaire qui aura clôturé une semaine bien chargée. L’occasion pour Jah de décompresser aux côtés de ses collègues et de son crush ce soir. Mais avant, il lui est impératif de passer chez elle/lui pour se changer, se parfumer et surtout laver son sac imbibé de sauce moutarde. Sur le chemin de la sortie, il/elle croise son patron à qui elle/il confirme que le dossier a été envoyé dans les temps. “Je n’ai toujours pas reçu le dossier en question, mais je le veux avant minuit impérativement” rétorque-t-il. Jah vérifie sur son ordinateur et constate que son dossier a subi un échec d’envoi.

Nouveau rebondissement dans la journée de Jah qui ne perd pas une seule seconde et court en direction du métro pour régler ce léger problème à domicile. Un petit Peace of Mind de Ugly Heroes, avec une instru boom bap et des paroles poignantes, dans ses écouteurs, pour faire de l’ordre dans son esprit brouillon, avant de s’attaquer à une nouvelle problématique.

18h30 : Ce qui était censé être un petit problème s’avère en être un de taille : l’ordinateur de Jah a subi un redémarrage forcé, ce qui a effacé la sauvegarde de son dossier. Pire encore, il n’arrive pas à re-télécharger l’exemplaire du dossier mal envoyé, le seul exemplaire qui lui restait…

Un message s’affiche sur son téléphone qui vibre à la même allure que J, au bord de la crise de nerfs. “Je fais un apéro chez moi à 22h avant de sortir, j’espère que tu seras des nôtres” lui envoie son crush. Plus le temps de s’apitoyer sur son sort, Jah doit réfléchir vite et s’activer pour avoir encore la chance de passer un agréable début de week-end, quitte à utiliser son cerveau jusqu’à épuisement. Des feuilles de brouillons du dossier, un cerveau bien constitué, une assez bonne mémoire photographique, des musiques de rap chill et mélancolique avec des lyricistes hors catégorie (allant du flow suave de Fabe aux paroles puissantes d’Eminem sur sa vie, sans oublier les tours de passe-passe de A tribe Called Quest et la mélancolie de Guizmo), voilà ce qui lui faut pour remédier à son problème. Des éléments qui sont en sa possession fort heureusement.


21h30 : Le début de soirée aura été mentalement très dur, mais le dossier est enfin bouclé pour la seconde fois. Complètement usé, Jah peut enfin se permettre une micro sieste, suivi d’une bonne douche chaude, et se préparer avant de se diriger vers l’apéro. Le trajet jusqu’à l’appart se fait sur un petit nuage, sans musique, uniquement la légèreté du trajet sans aucun poids ni contrainte, à tête reposée comme dans un doux rêve. Une fois devant la porte, deux tocs suffisent à susciter l’attention de son crush qui vient lui ouvrir. “Tu as réussi à venir à l’heure, ça me fait plaisir” dit-elle/il d’un air jovial. “Tout le monde vient d’arriver, on va commencer l’apéro en douceur, va te poser avec les autres“.

J rejoins donc ses collègues dans le salon où tous les ingrédients sont disposés pour un bon début de soirée. “Tu veux mettre une petite musique, Jah ?” Demande l’un de ses collègues. Jah s’empresse donc de mettre Jackpotes 2000 du groupe 113, un son qui convient bien à un début de soirée avec ses allures de musique funk et les paroles simples et efficaces de Rim’K, A.P. et Mokobé. 

23h55 : Après un apéro arrosé entre collègues de travail, direction la boîte de nuit. Une rentrée sans accroc et les voilà tous à se déchaîner sur la piste de danse, excepté Jah, accoudé-e au bar dans un état vaseux, qui n’arrête pas d’avoir une petite sonnerie dans sa tête qui le dérange. Une gêne sûrement due aux 5 shots de whisky miel qu’il/elle a ingurgité d’affilée lors de l’apéro. Cela ne l’empêche pas de prendre son courage à deux mains et inviter son crush pour une danse. Une invitation qu’elle/il feint de refuser tout d’abord pour enfin le rejoindre sur la piste. 

Ce moment précis, J l’attendait déjà depuis ce midi et s’y était préparé-e psychologiquement : les corps qui se rapprochent et s’enlacent pour un slow, les petits mots doux tout près des oreilles, le jeu de regard, les têtes qui se rapprochent au fur et à mesure que les secondes passent. Tout était aligné de façon à finir cette journée mouvementée sur une très bonne note. Tout sauf cette mélodie qui reste logé dans son cerveau comme un bruit sourd et qui ne cesse de prendre en volume. Les notes deviennent de plus en plus claires et Jah sent qu’elle/il connaît cette musique qui grandit en lui/elle. L’air ressemble étrangement au début de Juicy de Notorious BIG. Mais peu importe, le plus important reste devant lui. Il/elle s’élance en direction de son crush qui fait de même. Les yeux se ferment pour se rouvrir…sur sa table de travail. Coup dur, la micro-sieste aura été plus longue que prévu. Déboussolé-e, Jah regarde son ordinateur qui affiche 2h du matin, et voit sa playlist de musique tourner en boucle depuis plusieurs heures, avec à l’écoute le son de Notorious BIG qu’il/elle pensait avoir dans la tête, une façon bien comique de lui dire, comme Biggy au tout début de son premier couplet, que tout cela n’était qu’un rêve.

2h15 : Cela fait maintenant 15 minutes que Jah n’a pas bougé de sa chaise, complètement abasourdi-e par ce qui vient de lui arriver. Tout semblait si réel qu’elle/il ne s’est pas rendu compte de la supercherie. Sur le point de finir sa nuit et de tirer définitivement un trait sur cette journée rempli d’échecs, son téléphone, posé sur son lit, vibre plusieurs fois. En attrapant son téléphone, il/elle constate de multiples appels manqués de son crush qui a essayé de le/la joindre toute la soirée, en vain, et qui lui explique qu’elle/il est rentré-e tôt, car l’ambiance dans la boîte n’était plus trop à son goût. “C’est dommage que tu ne sois pas venu ce soir, je serais sûrement resté plus longtemps.” 

Ne perdant pas une seule seconde, J lui renvoie un message pour lui proposer un verre samedi soir. Une proposition qu’elle/il décline. Second coup dur. “Par contre dimanche soir, c’est avec grand plaisir. On en reparle demain, bonne nuit J !” ajoute-t-il/elle. La tête dans les nuages, Jah se laisse tomber sur son lit qu’il/elle n’avait pas côtoyé depuis des heures. Il/elle lance Come Close de Common, un rap aux allures de ballade amoureuse, avant de fermer ses yeux en se disant que sa journée n’aura pas été si désagréable après coup.

Ce récit touche à sa fin, mais vous pouvez toujours prolonger cette histoire avec la playlist “Journée de galère old school” qui regroupe les musiques présentes dans le récit et pleins d’autres surprises.

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