N.O MAKERS : DU JAMAIS VU DANS TES ECOUTEURS

Lorsque résonne leur EP, “N.O Makers Radio”, il est difficile d’identifier le genre ou de le comparer à quelque chose d’existant. Pourtant une chose est sûre : notre tête se secoue au rythme enjoué de leurs instruments. Entre traditions et expérimentations musicales, N.O Makers se détache totalement des conventions actuelles. Rencontre avec les membres du groupe : Elie à la guitare, Etienne aux percussions, Victor à la basse et N.O au micro.

  • Cela fait un peu plus d’un mois que votre projet est sorti, comment vous sentez-vous maintenant que la bête a été lâchée ?

N.O : On se sent soulagé, c’est un vrai accomplissement et une page qui se tourne. Bien que le projet comporte « seulement » 6 titres, cela représente plus d’une année de travail, du fait des conditions particulières de cette année 2020 mais aussi de notre perfectionnisme qui nous pousse toujours à affiner notre musique. C’est aussi notre premier projet, ce qui explique qu’on a pas mal cherché la bonne manière de travailler en studio.

  • Entre l’utilisation que vous faites des instruments et la voix si particulière de N.O, votre groupe sort de l’ordinaire et de ce qu’on a l’habitude d’écouter dans le rap en 2020. Comment définiriez- vous ces spécificités ?

Elie : En fait, on pourrait définir notre groupe comme une formation rock traditionnelle, avec la seule différence que le chanteur est un rappeur. C’est vrai qu’une formation comme celle-là est assez peu utilisée, du moins en France. Ce qu’on essaye de développer, c’est que chaque musicien se répartisse l’espace sonore de manière plus ou moins égale. Bien sûr, par nature, le chanteur est toujours mis un peu plus en avant, mais moins qu’un rappeur qui jouerait avec un backing band par exemple (comme c’est souvent le cas aux Etats-Unis, et en France plus récemment).

  • Ces procédés musicaux forment toute l’identité de votre EP. Est-ce qu’on doit s’attendre à retrouver cela sur vos futurs projets ou pensez-vous qu’il y aura d’autres expérimentations ?

Etienne : Depuis notre création en 2017, on s’est vraiment construit au fil des concerts. Tous les morceaux du projet ont été joués et rejoués sur scène, et on a choisi ceux qui parlaient le plus au public. On aime se définir comme un groupe « live », dans la mesure où on a beaucoup fait de scène avant de se mettre à bosser en studio. C’est pour ça notamment qu’en studio, on essaye de garder une colonne vertébrale axée sur basse/batterie/guitare, et de rajouter au fur et à mesure d’autres éléments sonores (claviers, percussions logicielles, mandoline, violon, trompette, contrebasse, sons d’ambiance divers…). Pour nos futurs projets, l’approche sera différente dans la mesure où l’on démarrera d’une base studio, ce qui donnera probablement une autre esthétique.

  • On retrouve d’ailleurs sur le projet pas mal d’ambiances différentes. Était-ce une volonté de montrer l’étendue de votre palette musicale sur 5 morceaux ?

N.O : Oui, c’était tout à fait l’idée. Ce projet se veut comme une carte de visite qui comporterait un aperçu des différentes facettes de notre univers musical. C’est un peu délicat dans la mesure où l’auditeur ne va pas forcément se retrouver dans tous les morceaux, mais on voulait vraiment accrocher l’oreille et attiser la curiosité pour les projets à venir.

  • Bien que l’EP puisse être classé dans la catégorie hip-hop, on a l’impression d’écouter le fruit d’inspirations musicales aussi diverses que variées. Avez-vous eu une éducation musicale différente ?

Victor : Avec Etienne (batterie) et Elie (guitare), on eu la chance de pratiquer plusieurs instruments dès notre enfance et de pouvoir poursuivre un enseignement musical au sein du même conservatoire. On a joué ensemble dans différentes formations depuis l’adolescence (jazz, rock, jazz manouche…) et cela nous a donné une base assez solide ainsi qu’une certaine cohésion de groupe qui, je pense, est  confortable pour N.O. Car lui rappe depuis un bon moment mais n’a pas les mêmes bases théoriques et instrumentales ; c’est la fusion des deux approches qui donne un côté intéressant lors de la construction des morceaux.

Après, chaque membre a des inspirations musicales différentes. En vrac, on peut dire : de la musique classique, traditionnelle, du zouk, de la folk, de la country, du rockabilly, du free jazz, de la bluegrass, de la musique de films et de jeux vidéo… On aime vraiment puiser un peu partout pour construire nos morceaux.

  • Au contraire quelles sont vos références communes ?

Etienne : En ce qui concerne les 3 instrumentistes, beaucoup de références communes dans le jazz (Horace Silver, Wayne Shorter, Django Reinhardt) le rock (Red Hot Chili Peppers, Creedence, Pink Floyd, the Clash, J.J Cale), le reggae et le ska (Toots, the Specials, Bob Marley), la musique classique (Chopin, Satie)… Avec N.O, on retrouve des influences communes sur des musiques plutôt hip-hop, rap, soul ou funk (Michael Jackson, Otis Redding, Travis Scott, Kendrick Lamar, Anderson Paak, Jamiroquai…)

  • On a d’ailleurs l’impression que vous ne recherchez pas seulement l’auditeur de rap mais un public bien plus large, c’est vrai ou je dis une connerie ?

Elie : Non, c’est vrai. Après, il faut reconnaître que la frontière entre rap et pop est en train de disparaître et que le rap est en train de devenir en quelque sorte la nouvelle variété française. D’ailleurs, on a du mal à trouver un genre musical qui colle parfaitement à ce que l’on fait, et cela nous convient car ça a l’avantage de ne pas nous mettre de barrière lorsque l’on compose.

Donc on ne cherche pas un type d’auditeur précis et ça se peut se voir lors de nos concerts, où le public est quand même assez diversifié.

  • Vous êtes 4 dans le groupe et pas mal de personnes gravitent autour de vous. Comment faites-vous pour vous mettre d’accord sur les choix artistiques ?

N.O : Sur le plan musical, en général, c’est rare qu’il y ait des désaccords entre les membres du groupe sur les choix artistiques. Tout ça se travaille en répétition et les éléments sonores qui ne font pas l’unanimité sont souvent abandonnés. Sur tout ce qui concerne les visuels et la communication, avec notre manager Antoine, on a en quelque sorte tous les cinq un rôle de directeur artistique.

  • Disons quelques mots sur votre visuel. On ressent qu’il y a une énergie commune avec beaucoup de travail derrière (que ce soit les clips, les affiches, les covers…). Comment pourriez-vous la décrire ?

Victor : Sur le plan visuel, on a la chance de travailler avec des personnes proches de nous qui apportent vraiment un plus à notre univers. On essaie de développer une identité visuelle qui colle à la diversité de nos univers. Côté graphisme et photo, on travaille conjointement avec plusieurs personnes (Lola, Pierre, Clara, Sara, Tonio) qui apportent chacun leur pierre à l’édifice.

Pareil pour les clips ; on a bossé avec plusieurs personnes (Jakson Lu, GLX, Martin, Félix, Tonio, 93e Chambre…) qui nous ont fait bénéficier de leur vision artistique, qui évidemment varie d’une personne à l’autre. C’est moi qui m’occupe du côté illustration (affiches, covers, vêtements), ajoutant à tout ça une dimension graphique inspirée en partie de la bande dessinée.

On essaie de faire en sorte que ces trois supports comportent des éléments visuels communs, comme par exemple une certaine obscurité dans le choix des couleurs.

  •  Pour finir, revenons sur votre musique. Si quelqu’un qui ne connaissait par le groupe devait écouter un morceau pour comprendre votre vibe, lequel ça serait ?

Etienne :On lui conseillerait « Penthouse ». C’est en quelque sorte le morceau le plus synthétique de notre univers, avec une esthétique qui emprunte aussi bien au hip-hop « traditionnel » et à la trap qu’au rock et à la musique symphonique. La base de l’instru (comme sur les autres morceaux) est constituée d’une prise de son « live » de la basse et de la batterie, sur laquelle vient s’ajouter la guitare puis les claviers, la trompette et la mandoline. Tout ça en laissant assez de place pour que la voix particulière de N.O se détache et puisse nous faire entendre son texte rythmé et mélancolique. C’est par ailleurs le premier morceau qu’on a créé tous les quatres.

  •  Que peut-on attendre maintenant de N.O Makers ?

N.O : Dans un futur proche, notre troisième clip qui sortira le 19/02. Il met en image « Rimeur Cosmique », le bonus track de l’EP, disponible pour l’instant exclusivement sur la version physique. Il a été tourné par 93e Chambre, dans le cadre du séminaire « Good Sessions », qui a été organisé par la marque de sapes Good Company et qui réunit 5 autres rappeurs de l’Est parisien.

Côté musique, 2021 sera l’occasion pour nous de préparer notre deuxième projet, dont le format n’a pas encore été décidé, mais qui se voudra en tout cas plus homogène que le premier.

On a en tout cas hâte de remonter sur scène et de renouer avec le public, car c’est ce qui constitue l’essence de notre groupe !

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