“Que des numéros 10” (3/3) : Les milieux relayeurs et l’extraterrestre

Leur nombre a chuté considérablement durant les années 2010. Pendant longtemps, ils ont été les stars du rectangle vert. Tout le monde n’avait d’yeux que pour eux et leur fameux numéro 10 floqué sur le dos. Platini, Laudrup, Maradona, Zidane, Socrates, Baggio, Rui Costa, Riquelme ont ébloui le terrain par leur classe, technique et capacité à gagner un match à eux seuls avec un dribble, un geste, une passe. Mais désormais ils ne sont plus que des souvenirs d’un football romantique d’autrefois. Cependant leur capacité à dicter et mener le jeu se  retrouve dans plusieurs  styles de joueurs. Présentation des différents numéros 10 d’aujourd’hui avec le dernier épisode sur les milieux relayeurs et l’extraterrestre .

Voir aussi : Que des numéros 10 (1/3) : Les 10 à l’ancienne et les 9 et demi Que des numéros 10 (2/3) : Les registas et les ailiers créateurs

Les milieux relayeurs

(De Bruyne, Bernardo, Iniesta, Silva, Modric) 

Milieu relayeur ou l’eldorado des numéros 10, voici peut-être le poste où les meneurs de jeu se retrouvent le plus souvent dans le football moderne. Avec l’avènement du 4-3-3 du Barça de Guardiola et celui de la Roja de Del Bosque pendant le début des années 2010, les joueurs créatifs ont progressivement reculé sur le terrain pour occuper les postes de relayeur. Bon nombre de numéros 10 ont fait cette mue durant la dernière décennie : De Bruyne, David Silva, Bernardo à Manchester City, Modric pur numéro 10 à Tottenham devenu relayeur droit au Real Madrid (2012-). 


Au milieu, ces joueurs cités ont une grosse caisse physique pour pouvoir aider au contre-pressing et à la récupération du ballon. Pep Guardiola à propos de Kevin De Bruyne en décembre 2019 “ Il n’est pas bon qu’avec le ballon, il l’est aussi sans. Il a tout. C’est un combattant, il nous aide très bien à mettre la pression.” À Manchester City, les milieux relayeurs ne sont jamais exempts d’efforts défensifs, ils sont parfois les joueurs courant le plus sur le terrain comme Bernardo Silva lors de la saison 2018/2019.

Ces numéros 10 d’exception placés en tant que milieu relayeur doivent se situer entre les lignes, dans les demi-espaces avec le corps positionné en ¾ pour mieux réceptionner et donner le ballon par la suite. Ils créent le lien entre l’attaque et la défense. Les milieux relayeurs guident le jeu de leur équipe comme le phare avec le bateau. À la manœuvre de la circulation du ballon, ils sont aussi dotés d’une excellente frappe de loin qui leur permet d’être dangereux au niveau des 30 mètres adverses.

À l’heure où les transitions rapides dominent le football, le poste de milieu relayeur occupé par des ex-numéros 10 s’impose comme le refuge idéal des meneurs de jeu à condition d’avoir la capacité physique afin de reproduire les courses à haute intensité qu’exigent le poste.

L’extraterrestre

(Messi)

Imaginez un joueur ayant été à la fois un pur 10 à l’ancienne, un 9 ½ d’exception et un ailier créatif, vous me direz surement que ce footballeur n’existe pas. Comment posséder autant de qualités ? Rassemblez les pierres de l’infinité du football et vous obtenez un géant façon Thanos en terme de puissance, domination mais en aucun cas en terme de taille puisque l’homme évoqué, l’extraterrestre (ou peut-être les deux) fait seulement 1, 69 m et pèse 72 kg. Il s’agit d’un Argentin nommé Lionel Messi.

Inclassable parmi les catégories de “Que des numéros 10 dans ma team”, il fallait donc lui donner sa propre catégorie tellement le natif de Rosario a cumulé les différentes positions et fonctions du meneur de jeu. Pendant le début de sa carrière (2007-2009), le blaugrana évolue au poste d’ailier droit aux côtés d’Eto’o et Ronaldinho puis Henry. La Pulga ne dicte encore pas le jeu. Il faut attendre l’arrivée de Guardiola sur le banc catalan pour que Messi devienne un réel meneur de jeu. En effet, Pep le place pour la première fois en tant que faux numéro 9 lors du clasico du 2 mai 2009 (6-2, victoire du Barça).

Durant près de 5 années, le sextuple ballon d’or va occuper cette position. Placé entre les lignes, Messi est un calvaire pour les défenseurs qui ne savent pas s’ils doivent garder leur alignement ou suivre l’argentin dans ses décrochages. Insaisissable, trop vif toujours décisif par la passe, un dribble ou un but, l’Argentin connaît en tant que faux 9 la période la plus prolifique de sa carrière en terme de buts (227 buts, 91 passes décisives entre 2010-2014).

À partir de 2014, Léo Messi forme la MSN, un trio redoutable avec Suarez et Neymar. La Pulga repositionnée sur l’aile droite va désormais prendre de plus en plus un rôle d’organisateur de jeu après le départ de Xavi du Barça et la baisse de forme d’Iniesta. Le numéro 10 barcelonais va souvent se retrouver dans le coeur et ainsi distiller des bons ballons à ses coéquipiers tout en perçant les défenses adverses par du dribble, des courses dévastatrices. Il aura vraiment ce rôle d’ailier créatif durant toute la période MSN jusqu’au départ de Neymar en 2017.


Credit Photo : Position moyenne de Messi au Barça sous ses différents entraineurs

Au fil des années que les entraîneurs (Guardiola, Vilanova, Enrique) et des joueurs majeurs (Xavi, Iniesta, Alves) quittent le Barça, le club catalan perd quelque peu son identité de jeu basée sur la possession, ceci poussant Messi à prendre encore plus de responsabilités sur le terrain. Capitaine du navire blaugrana, l’attaquant argentin se multiplie et devient un joueur total. Il construit les actions comme un pur numéro 10 en décrochant bas au niveau du rond central, combine comme un 9 ½  avec Suarez, perce les défenses adverses comme un ailier et conclut les actions souvent avec sa finition hors-pair.

Moins explosif qu’à ses débuts mais plus complet, Messi 33 ans joue tout en intelligence, finesse et technique. Il est le chef d’orchestre de son équipe, dicte le tempo sur lequel ses coéquipiers doivent interpréter la partition. Possédant des qualités uniques sur le terrain, Messi s’inscrit dans la lignée des plus grands numéros 10 de l’histoire par sa vision de jeu, son toucher de balle, ses passes décisives (285 dans sa carrière) une classe hors du commun. À l’heure où la fin se rapproche pour l’argentin, il n’a jamais semblé aussi fort et complet (25 buts et 22 passes décisives en Liga 2019/2020) comme s’il se bonifiait avec le temps comme le bon vin, alors comme le bon vin savourons le avant que le verre soit vide.

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